Par Chérif Salif SY, Secrétaire général de l’association Sénégalaise des Économistes (ASE)
Une chose est certaine, les pays sous-développés ont toujours accepté l'aide publique extérieure et continuent de la réclamer depuis sa première formulation à la première conférence de la CNUCED, en 1964. Mais le débat sur sa nécessité, sa neutralité, son efficacité est encore en cours.
Du côté des Nations unies, on peut noter que le lancement des Objectifs du millénaire pour le développement (OMD) après la décennie du développement des années 1990 est la preuve de l'inefficacité de l'aide. Au surplus, on n'y parle plus de filets de sécurité comme au moment des programmes d'ajustement structurel, mais surtout de "réduire de moitié l'extrême pauvreté". C'est sans commentaire. Aujourd'hui, le discours dominant parle d'une nouvelle APD technique, en faveur des marchés pour la protection des "biens publics mondiaux". La question est de savoir à ce moment, si une aide publique au développement peut-être "apolitique". Ma réponse est non.
Je pense alors qu'il faut que les Africains mettent de plus en plus l'accent sur leurs ressources internes et la fiscalité. Voyez par exemple, sur les quinze dernières années, les transferts des émigrés africains ont été multipliés par six alors que l'aide publique au développement n'a pas varié. En matière de croissance économique, le continent n'a pas de leçons à apprendre du monde occidental. Entre 1991 et 2009 en tenant compte de l'impact de la crise financière de 2008, l'Afrique, avec une moyenne de croissance économique de 5,09 %, est largement au-dessus de la moyenne mondiale pour la même période, qui est de 3,35 % contre 1,65 % pour les pays industrialisés.
Regardons donc vers l'Afrique et nous verrons qu'il existe plusieurs raisons d'espérer. La région a été, en 2009, selon Mc Kinsey & Co, la troisième contributrice a la croissance mondiale après la Chine et l'Inde. L'inflation a diminué de moitié depuis les années 1990, les réserves de change ont cru de 30%, les finances publiques ont enregistré un excédent de 2,8 % du PIB en 2008, comparé à un déficit de 1,4 % entre 2000 et 2005, et le taux d'épargne est estimé entre 10 et 20%.
En dépit du discours misérabiliste que l'on se plaît à entonner à l'envie sur l'Afrique, voilà tout de même autant de raisons de penser que quelque chose de bien est en train de se passer en Afrique. Quelque chose riche d'enseignements et qu'il faut consolider même si la gouvernance dans presque tous les pays reste un grave problème qui mène à une impasse.
Malgré des difficultés persistantes pour certains pays, les perspectives sont donc plus favorables pour la plupart des pays qu'elles ne l'avaient été depuis longtemps. Plusieurs facteurs sous-tendent ce redressement et pas uniquement l'augmentation de l'aide, portée surtout par des allégements de dette ; l'environnement macro-économique est l'amélioré et stabilisé; la croissance, de façon générale, a été dopée par la mise en exploitation de nouveaux gisements pétroliers en Afrique australe et centrale, mais elle concerne aussi les pays qui ne produisent pas de pétrole.
Comment dans ce contexte faire en sorte que cette croissance profite à tous? Comment assurer par exemple le plein emploi? En provocant et en soutenant cette expansion par une politique d'industrialisation et de développent des exportations de produits manufacturés; d'aide aux investissements privés; de relance de la consommation et surtout de maintient des investissements publics.
Source : Le Monde
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